J’ai la conviction que tout est parfait. Le merveilleux comme le douloureux, l’exaltant comme le déprimant, le banal comme l’extraordinaire, tout est parfait.

Un jour, une amie et collègue qui se débattait avec une situation de vie qu’elle ressentait comme moins qu’idéale, m’a demandé comment j’avais réussi à intégrer cette conviction, cette acceptation profonde de ce qui est. Elle m’a prise au dépourvu et je n’ai su quoi répondre. Après quelques minutes de réflexion, je me suis rendue à l’évidence : c’est simplement un choix que j’ai fait. J’ai choisi de croire que tout est parfait, tout a un sens, même si depuis notre point de vue « le nez dans le tableau », nous n’arrivons pas forcément à saisir, comprendre, ressentir cette perfection ou ce sens.

Je ne sais pas si c’est vrai. Et pour être tout à fait honnête, ça m’est complètement égal ! Ce qui m’importe, c’est de savoir si cette croyance me porte, m’élève, me soutient, ou si au contraire elle me limite. En l’occurrence, et sans la moindre hésitation, ma croyance que tout est parfait à un niveau bien au-delà de ce qu’on peut appréhender depuis notre position humaine me sert. Elle m’aide à avancer dans ma vie avec sérénité et audace, avec courage et humilité. Test passé, je la garde.

Evidemment, par moment, j’oublie. J’oublie que tout est parfait et je me plains, ou je souhaite que les choses soient différentes, ou je rêve d’avoir pris d’autres décisions, choisi d’autres embranchements dans le chemin de ma vie. Puis, au détour d’une colline, la vue se dégage et je vois plus clair, aussi bien devant que derrière.

Je suis justement dans une clairière où la vue se dégage. Depuis plus d’une année, je me sens irrésistiblement attirée vers le monde de l’entreprenariat au féminin. Ce n’est pas juste l’envie de faire partie de cet univers, mais plutôt l’envie de promouvoir la femme dans le monde, de l’encourager à oser être elle et se reconnaître merveilleuse, oser briller et donner le meilleur d’elle-même, pour le plus grand bénéfice de tous.

Je ressens très fortement l’appel d’inspirer la femme à prendre sa place dans sa vie et dans le monde. Et forcément, puisque c’est un appel du cœur, donc quelque chose qui est important pour moi, doutes et peurs m’assaillent avec d’autant plus d’aisance. Qui suis-je pour aider les femmes à entreprendre leur vie, révéler leur splendeur et exprimer leur plein potentiel ? Moi qui ai passé ma vie à me faire discrète, à éviter, à brider mon potentiel, à diminuer ma splendeur, à retenir ce que je pourrais avoir à offrir ?

La clairière m’ouvre une nouvelle vue, une perspective que je n’avais pas anticipée et qui révèle la perfection de tout ce qui est. C’est comme voir les indices après avoir résolu l’énigme : a posteriori tout paraît évident.

J’ai grandi entourée de parents qui percevaient mon potentiel et m’ont toujours dit que je pouvais tout faire: quelle que soit mon ambition, j’avais les capacités d’y arriver. C’est objectivement une projection encourageante, et pourtant, j’ai longtemps eu l’impression de ne pas en avoir fait grand-chose. En fait, tout mon parcours est parfait. Il m’a donné toutes les opportunités pour expérimenter exactement ce que je devais expérimenter. Chaque pas m’a rapprochée de la mission que je ne connaissais pas alors, et qui est chaque jour plus nette: inspirer les femmes à récupérer leur pouvoir, reconnaître leur valeur et l’offrir au monde.

Avec la sagesse d’aujourd’hui, je vous propose de regarder les étapes d’hier et observer l’ingrédient essentiel que chacune est venue apporter.

Etape 1: expérimenter la discrimination de genre

Vive de corps et d’esprit, ma plus grande difficulté à l’école était de ne pas trop m’ennuyer en attendant les autres. J’étais à l’aise dans toutes les branches, jusqu’au moment de choisir une orientation. A onze ans et pendant un semestre décisif, j’ai eu des notes de math qui slalomaient entre l’excellent et l’acceptable. Résultats trop variables ont dit les profs, qui m’ont déconseillé de m’orienter dans une filière scientifique. Mes notes littéraires n’étaient pas significativement meilleures, mais j’ai poursuivi ma scolarité en langues modernes. Ce n’était pas atroce. J’aime les langues et j’y étais à l’aise aussi, mais j’ai toujours eu l’impression que ça avait été un non-choix conditionné plus par mon sexe que mes capacités. D’ailleurs, pendant les 7 années restantes jusqu’au bac, j’ai systématiquement eu 10/10 puis 6/6 en math, chimie et biologie…

Etape 2: connaître le milieu

J’ai passé ma vie entourée de femmes, et il m’a fallu 40 ans pour passer de la résignation à l’émerveillement. Je viens d’une famille de filles. Bien sûr, j’ai un papa, et même des oncles, mais ma lignée maternelle est constituée exclusivement de filles sur 4 générations. Mon arrière-grand-mère n’a eu que des descendantes (12 pour être précise)… jusqu’à la naissance de mon fils.

A l’école, passée cette fameuse étape d’orientation, les garçons ont pour ainsi dire disparu de mes classes: ils étaient entre 0 et 2 selon les années. Puis, après quelques détours et malgré mon père qui m’encourageait à aborder l’obstétrique par la voie médicale, j’ai entrepris une formation en soins infirmiers et travaillé à la maternité. Mes formations suivantes (naturopathe, prof de yoga) n’y ont rien changé: ce sont majoritairement les femmes qui consultent des thérapeutes dans une démarche préventive et qui peuplent les salles de yoga.

Etape 3: observer l’évolution professionnelle

Un point qui m’a interpelée dès le début dans le monde des soins est l’inversion des proportions. Si à la base de la pyramide, tant à l’entrée de la formation que dans les équipes de soins, les femmes sont très largement majoritaires, à mesure qu’on grimpe dans la hiérarchie les hommes sont de plus en plus présents. Où sont donc passées toutes les femmes compétentes et formées? Pourquoi est-ce que les postes à responsabilités sont-ils si souvent occupés par des hommes? Qu’est-ce qui retient ou empêche les femmes de dominer une profession reconnue comme féminine? La même question se pose pour le domaine de l’éducation, avec une masse d’enseignantes dirigées par un directeur d’établissement scolaire. Evidemment, ce n’est pas toujours le cas, mais l’inversion des proportions est significative.

Etape 4: expérimenter la dépendance

Il y a quelques années, mon mari et moi avons rencontré un conseiller financier. Afin d’obtenir une vue d’ensemble de notre situation, il nous a invité à faire le bilan de notre parcours financier. J’ai alors pris conscience que je n’avais jamais été indépendante, financièrement parlant. En faisant la moyenne par décennie de mes rentrées professionnelles, j’ai constaté avec stupeur que mes revenus ne m’avaient jamais permis de subvenir seule à mes besoins. Ayant toujours eu un travail depuis l’âge de 16 ans, hormis les deux périodes qui ont suivi mes accouchements, je dois avouer que la réalité m’a secouée. Bien sûr, en tant que famille, nous avions fait le choix que je m’occupe prioritairement de nos enfants. Evidemment, j’ai la chance de ne pas avoir à travailler pour remplir les assiettes et l’opportunité d’orienter ma vie professionnelle en fonction de ce qui fait sens pour moi. La prise de conscience de ma situation de dépendance typiquement féminine n’en a pas moins été un électro-choc.

Aujourd’hui, du haut de ma clairière, je vois la perfection de tout mon parcours. Chaque étape a eu son utilité pour faire émerger en moi ma mission. Chacune a aiguisé ma sensibilité sur un aspect différent du sujet. Chacune m’a amenée à accorder de l’importance à la place de la femme dans le monde, à l’interaction homme-femme dans le monde professionnel et la vie familiale. Chacune m’a fourni un atout de plus pour apporter ma contribution au monde, un monde que je rêve riche de la pleine participation de tous ses protagonistes.

Au détour de la colline, je vois les pièces qui s’imbriquent pour donner sens à mon parcours. Tout est parfait.

Et vous, comment s’imbriquent vos pièces? Quelle image parfaite se dégage quand vous observez votre parcours? Vers quelle contrée merveilleuse vous guident vos choix? Qui êtes-vous devenu-e au fil du chemin?

En honorant notre parcours, nous reconnaissons que tout a été parfait. Nous sommes au bon endroit au bon moment et la meilleure personne possible pour réaliser notre mission. Nous avons toute la légitimité du monde. La paix inonde notre coeur. Nous pouvons continuer d’avancer avec enthousiasme et sérénité. Tout est parfait.

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